Des comptes inexacts, une troublante sortie de redressement judiciaire, une administration inerte
(Article mis à jour en juin 2023)
« Les comptes annuels doivent être réguliers, sincères et donner une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l’entreprise » (Code de commerce, article 123-14; 1er alinéa) »
La note ci-dessous a été élaborée en 2013 par un ancien cadre de banque. Elle s’appuie sur les comptes de la SHVSS (Société Hydroélectrique de salles-la-Source), tels que disponibles sur Internet et visés par le greffe du Tribunal de Commerce de Rodez.
Elle liste les innombrables interrogations qu’en suscite la lecture. Enfin elle revient sur la sortie de redressement judiciaire de l’entreprise en 2008, dans des conditions qui resteraient à clarifier.
A elle seule, cette étude justifie la demande d’une enquête administrative et financière indépendante sur ce dossier :
La Société Hydroélectrique de la Vallée de Salles-la-Source est une SARL créée le 19 janvier 1931 par un petit industriel local, passée ensuite à trois familles (Guibert, Gaffier et Bastide) par succession, rachat ou autre.
Les frères Jean-Gérard et Laurent GUIBERT s’en sont retrouvés seuls associés, soit directement, soit au travers de la SARL « Source Aveyronnaise d’Investissement », à partir de 1996, M. Jean-Gérard GUIBERT en étant depuis le seul gérant.
1 / Des comptes inexacts
Analyse des comptes annuels de la SARL Société Hydro électrique de la Vallée de Salles-la-Source – Etablissement Amédée Vidal »
On rappellera que : » Les comptes annuels doivent être réguliers, sincères et donner une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l’entreprise » (Code de commerce, article 123-14; 1er alinéa).
Or, à l’observation, dès le premier abord, tous les documents comptables présentés par la Société s’avèrent inexacts, souvent grossièrement. Dans la présente note, nous ne remonterons pas au-delà de 2005, mais cela sera suffisant pour être édifiant.
POURQUOI SONT-ILS INEXACTS ?
1/ Un bilan doit être équilibré, c’est à dire que le montant total du PASSIF doit être EGAL au montant total de l’ACTIF : pourquoi ? parce que l’ACTIF est la liste valorisée des biens immatériels, matériels, des créances et des avoirs financiers de la société qui sont financés par les ressources dont dispose l’entreprise, inscrites au PASSIF
-
ACTIF
PASSIF
Montant de l’erreur
31/12/2005
143 170
243 775
100 605
31/12/2006
143 170
33 345
-109 825
31/12/2007
208 831
65 745
-143 086
31/12/2008
300 851
300 851
0
31/12/2009
316 151
318 112
1 961
31/12/2010
301 569
301 569
0
31/12/2011
267 829
267 829
0
2/ Le bilan est la « photo » de la situation financière de la société à la fin de l’exercice et doit tenir compte des événements intervenus au cours de cet exercice. Les différents états fournis doivent permettre de retrouver les mouvements financiers y relatifs.
Par exemple : Une augmentation ou diminution des immobilisations brutes par acquisitions ou ventes de matériels et d’immobilier. Une dépréciation de ces mêmes immobilisations pour constater au moyen des« amortissements » la diminution de leur valeur d’usage.
Comptes 2005 à 2007 : il y a recopiage pur et simple de l’actif immobilisé (341 946 brut, 140 509 net) alors que, sans investissement ni désinvestissement (actif brut sans changement), les dotations aux amortissements venant en déduction pour obtenir le net auraient dû faire baisser ce « net ». Il y a eu des « dotations aux amortissements » (24 193 chaque année, encore un copié-collé). Malgré cela, le « net » reste rigoureusement le même.
Comptes 2008 : le montant des immobilisations et des amortissements de début d’exercice estdifférent de celui de la fin de l’exercice précédent !
Fin 2007 |
Début 2008 |
Delta |
||
Immobilisations brutes |
486 014 |
485 824 |
-190 |
|
– amortissements |
-24 193 |
-220 264 |
-196 071 |
Que s’est-il passé entre le 31 décembre 2007 et le 1er janvier 2008 ?
En tout cas, il y a eu au minimum « confusion » entre le montant des dotations annuelles et le montanttotal des amortissements…
Puis, de 2009 à 2011, ces immobilisations restent identiques. Où sont passées les dotations aux amortissements ?
3 / Le bilan doit retracer les décisions prises par l’AG en ce qui concerne – notamment – l’affectation du résultat. Les différentes AG dont nous avons eu communication ont décidé de ne procéder à aucunedistribution de bénéfice, le compte « report à nouveau » (RAN) devrait donc afficher le cumul de tous les résultats (le capital et les réserves restant rigoureusement stables sur la période) .
D’après les bilans en notre possession, soit depuis 1998, nous avons reconstitué le compte « report à nouveau » tel qu’il devrait être :
-
Résultat de l’exercice
RANsur bilans N+1
RAN rectifié
delta
1998
61 905
0
61 905
61 905
1999
74 109
0
136 014
136 014
2000
263
74 109
136 276
62 167
2001
11 482
0
147 758
147 758
2002
-55 985
0
91 773
91 773
2003
27 489
0
119 262
119 262
2004
16 271
0
135 533
135 533
2005
1 544
0
137 077
137 077
2006
-208 886
0
-71 809
-71 809
2007
-42 244
-33 345
-114 053
-80 708
2008
19 820
0
-94 233
-94 233
2009
19 450
19 820
-74 783
-94 603
2010
5 891
19 450
-68 892
-88 342
2011
1 793
5 891
-67 099
-72 990
Il n’y a que deux explications possibles : soit les Rapports de l’Assemblée Générale sont faux et la société a procédé à des distributions non déclarées…. soit la comptabilité est fausse … soit les deux !
4 / Quelques anomalies diverses et variées…
Comptes 2006 : L’Assemblée Générale du 25 mars 2007 relative à l’exercice 2006 mentionne une « créance Revel représentant 85 % du PASSSIF » (sic), alors qu’aucune créance ne figure au passif de cet exercice. En revanche, le compte de résultat de cette année-là enregistre des « autres charges externes » pour un montant de 184 887 €…. et l’année suivante d’ailleurs aussi ! Les documents comptables ne retracent pas la contrepartie de l’écriture qui a donné lieu à cette charge.
Par ailleurs, la dette envers la Municipalité relative aux redevances que le représentant de la société s’est engagé à verser n’apparaît nulle part alors que le montant devrait figurer dans les dettes au PASSIF.
Comptes 2007 : on note l’apparition d’un poste de dette NEGATIF de 121 951 € !
* soit il s’agit effectivement d’une dette, auquel cas le montant devrait s’ajouter au PASSIF,
* soit il s’agit d’une créance, auquel cas le montant devrait figurer à l’ACTIF,
et cette « dette » (ou créance ?) disparaît « miraculeusement » au bilan suivant (2008) !
Et malgré cela, la différence entre le total Actif et le total Passif (qui doivent toujours être rigoureusement égaux) est de … 143 K€ en 2007 (deux fois le total Passif).
Par ailleurs, on retrouve la somme de 184 887 € en « Autres charges externes » (la même, au centime près, qu’en 2006, correspondant probablement à l’affaire Revel) : on ne peut compter deux fois la même charge, ce qui signifierait que le résultat de l’exercice 2007 est un bénéfice de 142 643 € et non une perte de 42 244 € !
Comptes 2008 : Progrès, l’actif et le passif sont égaux, première fois depuis… de nombreuses années.
Nonobstant, le montant des immobilisations et des amortissements de début d’exercice est différent de celui de la fin de l’exercice précédent (voir §2 ci-dessus)
Mieux : le 15/01/2008, le Tribunal de commerce de Rodez met fin au redressement judiciaire au motif que « la Société dispose des sommes disponibles permettant le règlement immédiat du passif exigible et des frais de justice », jugement qui fait état de 125 374,50 € disponibles en trésorerie face à 124 106 € de sommes exigibles. On a bien dit : le 15 janvier 2008. Or, au 31/12/2007, le bilan fait apparaître une trésorerie disponible de … 3 418 € et un total de dettes de 21 054 € ! (aux dettes négatives de 121 951 € près, et à la différence de 100 000 € entre le total actif et le total passif.
Il s’en est passé, des choses, entre le 1er janvier et le 15 janvier 2008… (et aussi entre le 31/12/2007 et le 01/01/2008 – cf. infra)!
Et, cerise sur le gâteau, on ne trouvera dans aucun des bilans suivants (2008 à 2011) la moindre trace de ce paiement ou d’un apport qui l’aurait permis. De même qu’on ne trouvera jamais la moindre trace de la créance de la Commune de Salles-la-source (dont le jugement fait pourtant état, et que la SHVSS reconnaît dans ses PV d’assemblées) !
Comptes 2009, 10 et 11 : L’actif immobilisé est de nouveau « copié-collé », bien
que les amortissements (« copiés-collés » eux aussi) pratiqués devraient en diminuer la valeur nette.
En outre, dans le PV d’Assemblée Générale du 31/03/2011 relatif à l’exercice 2010, il est dit « il a fallu continuer la rénovation intégrale du logement dont sa maçonnerie et son chauffage » : le montant des « constructions » au bilan est assurément inexact puisqu’il est le même en 2008, 2009, 2010 et 2011 !
Nous ne commenterons pas les montants de charges, qui font le yoyo d’un exercice à l’autre, dont on ne sait rien, et qui semblent globalement bien importantes pour une petite micro-centrale. Idem pour les charges de personnel, qui semblent assez déconnectées de l’effectif…
Nous n’aborderons pas non plus les irrégularités juridiques relatives aux décisions relevant des Assemblées Générales (rémunération du gérant, rémunération « spéciale » en qualité de « juriste d’entreprise » – sic) notamment.
En guise de conclusion
Personne ne semble avoir été interpellé par cette masse d’irrégularités et d’anomalies en tout genre :
→Ainsi, la SARL SHVSS a été « admise au bénéfice du règlement judiciaire » par jugement du Tribunal de Rodez en date du 05/09/2006, sur assignation d’un important créancier – M. Gaston REVEL. Le Tribunal est donc en possession des comptes jusqu’à l’exercice 2005, entachés d’irrégularités qu’un élève de première année de CAP de comptabilité repérerait au premier coup d’œil. Au surplus, n’y figure à aucun moment la moindre dette, que ce soit envers M. Revel ou qui que ce soit d’autre. Et pourtant, c’est bien un créancier qui assigne !
De cela, le Tribunal ne semble pas le moins du monde s’étonner… Il est composé de trois chefs d’entreprises de bon niveau, le Président étant lui-même connu pour avoir largement investi dans des micro-centrales hydro-électriques : non seulement ces commerçants, élus par leurs pairs, savent parfaitement lire des comptes d’entreprises, mais le Président, en plus, connaît bien le secteur d’activité.
→ Le 15/01/2008, nous l’avons vu, la SHVSS « sort » du redressement judiciaire, ayant de quoi payer tous ses créanciers (!). Le Tribunal est composé du même Président, et de deux juges, dont l’un a été remplacé par un chef d’entreprise (importante, cédée depuis à une multinationale) du secteur électrique, fournisseur de la SHVSS au moins pour la réfection des groupes en 1997.
◊ A aucun moment, le Procureur de la République, qui donne son avis et est présent ou représenté aux audiences, ne s’étonne…
◊ A aucun moment, l’administrateur judiciaire, réputé être un professionnel de la gestion et de l’analyse économique (c’est justement son rôle), ne s’étonne…
Illustration (1) – le 31 décembre, la SHVSS ne possède que 3418 € de disponibilités et ne mentionne aucun produits à percevoir :
Télécharger le bilan simplifié 2007
Illustration (2) – Le 15 janvier 2008, l’administrateur judiciaire constate des réserves de 125 374, 50 € !
Actualisation au 31 mars 2018 : suite à de nombreux signalements au procureur de la république de 2013 à 2017, le gérant Jean-Gérard Guibert a comparu le 31 janvier devant le tribunal correctionnel de Rodez. Seule la période du 10 octobre 2010 au 31 décembre 2014 a été pris en compte.
Par jugement du 14 mars 2018, il a été condamné, pour « abus de biens sociaux », pour avoir détourné 600 000 € et plusieurs autre motifs à 9000 € d’amende (dont 6000 € avec sursis) et 3 ans d’interdiction de gestion. Il a fait appel.
Le procès en appel, prévu le 4 octobre 2021, a été reporté au 3 janvier 2022. le prévenu ne s’est pas présenté et la peine de 2018 du TGI de Rodez est devenue définitive (voir ici)
Neuf ans ont été nécessaires pour y parvenir (même si on peut regrette qu’une bonne partie des faits cités plus haut n’ont pas été sanctionnés…)
6 mois plus tard, « Ranimons la cascade ! » s’étonne que la peine ne soit toujours pas appliquée et que Jean-Gérard Guibert soit toujours gérant de son usine malgré la condamnation. Le procureur est saisi fin juin 2022. Sans grand espoir…
Finalement en décembre, la Société Hydroélectrique met comme gérant Geniès Imbert, 80 ans; « parrain » de l’installation.
En février 2023, celui-ci démissionne et c’est Françoise Guibert, 86 ans, domiciliée à la même adresse que Geniès Imbert, qui prend la tête (fictivement ?) de l’exploitation…
[…] Pourquoi étaient-ils attendus ? Voir : « L’entreprise qui avait oublié de publier ses comptes… » et »Mais où sont passés les 113 990 euros ? » et enfin « Des comptes inexacts, une troublante sortie de redressement judiciaire, une administrat… […]
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Un ruthénois vient d’écoper de six mois de prison pour un vol de 60 € !
http://www.centrepresseaveyron.fr/2016/03/07/il-vole-60-euros-et-ecope-de-six-mois-de-prison,992578.php
Que dirait le juge pour cette affaire qui dure depuis si longtemps ?
A moins qu’il n’y ait quelque complicité en haut lieu ?
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