Décès accidentel de l’ingénieur Pierre Bruyas, le jour de la mise en service de la microcentrale hydroélectrique de Salles-la-Source

C’est dans la douleur qu’a débuté l’actuelle usine hydroélectrique de Salles-la-Source. Un ingénieur y est mort électrocuté, le jour de sa mise en service en 1932. Les conditions et la date en étaient jusque là mal connues, le fait s’étant cependant conservé dans la mémoire orale de quelques anciens du village.

Un récent article publié par « Ranimons la cascade ! » sur ce site racontant la bénédiction de la micro-centrale par l’évêque, en présence de toutes les autorités politiques et administratives, a suscité un contact avec les descendants de cette personne pour qui cet événement est loin d’être oublié.

Voici le témoignage qu’ont accepté de communiquer les petits-enfants de Pierre Bruyas, et qui éclaire d’un jour nouveau le dossier de la micro-centrale :

« La cascade de Salles-la-Source ?

Jamais nous n’en avions entendu parler dans notre famille.

pierre-bruyas-1930En revanche, notre génération connaît le nom de ce village, mais il est enveloppé d’un brouillard tabou. Il évoque la disparition dramatique de notre grand-père lors de l’inauguration d’une centrale hydro-électrique.

Il y a environ 6 ans, après un reportage à la télé évoquant un village abandonné dans le massif Central suite à l’automatisation de sa centrale électrique, l’un de nous (6 petits-enfants) fait une recherche sur Internet qui le conduit au site de l’Association « Ranimons la Cascade ! ».

Il découvre avec surprise le volume des dossiers qu’elle évoque, tournant autour de l’histoire de la centrale hydro-électrique.

Au fil des pages, rapports et multiples articles de presse et témoignages divers, rien ni personne ne parle du décès de notre grand-père…

Nous savons que c’est le 20 juillet 1932, jour de l’inauguration, que l’accident s’est produit.

Ce n’est que 84 ans après que la publication sur le site de « Ranimons la Cascade ! » d’un article retrouvé récemment relate la fête donnée pour la bénédiction de la centrale hydro-électrique, passant sous silence les événements du 20 juillet en même temps que la mémoire de notre grand-père, Pierre BRUYAS.

Choqué par cette nouvelle, notre cousin questionne l’Association, en particulier sur l’inauguration du 20 juillet. Il lui est répondu que cette date ne leur est pas connue, pas plus que l’accident, à l’exception de la mémoire orale des anciens.

Voici les faits tels que nous les connaissons :

Pierre BRUYAS, Ingénieur des Arts et Métiers de Cluny, est directeur des Ateliers de Grosse Chaudronnerie de Terrenoire, près de Saint-Étienne (Loire), spécialisés dans la fabrication et l’installation de conduites forcées pour les centrales hydro-électriques. Cette entreprise réalise les travaux d’installation de l’Usine de Salles-la-Source qui deviendra la centrale Amédée Vidal.

Le 20 juillet 1932, jour de l’inauguration, en présence des concepteurs et dirigeants de la centrale, avançant près de l’usine, il s’effondre, foudroyé : il est décédé par électrocution, laissant une veuve et deux orphelins, un garçon de 23 ans et une fille de 12 ans. »

Les descendants de Pierre BRUYAS,
11 février 2016

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Ce que nous révèle ce récit :

Opacité et silence sont décidément dès les débuts au cœur du fonctionnement de la micro-centrale de Salles-la-Source. Il semble bien que la SHVSS a passé cet épisode initial par pertes et profits, et ait toujours occulté cet accident dans tous les documents qui ont paru par la suite, faisant disparaître Pierre Bruyas de la mémoire collective de Salles-la-Source.  Une enquête de gendarmerie a-t-elle eu lieu ? A-t-elle aussi été étouffée ?

Ce silence a eu pour conséquence de renforcer les souffrances de la famille endeuillée, et peut être d’éviter aux responsables de l’entreprise de la dédommager, à une époque où n’existaient ni la reconnaissance des accidents du travail, ni la Sécurité Sociale, ni de protection contre le chômage.

Ce silence s’explique sans doute surtout par la volonté d’étouffer tous soupçons sur une usine illégale et de protéger la renommée du jeune polytechnicien Etienne Bastide, concepteur de la micro-centrale.

La « bénédiction de l’usine » racontée dans l’article de  l’Union catholique, où « autorités civiles et religieuses » sablent gaiement le Champagne, quelques mois après le tragique accident, renforce le sentiment de malaise sur cette entreprise. D’autant qu’est présent le représentant des services hydroélectriques de l’Etat, l’ingénieur Brugidou qui cautionne…

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Extrait du registre de décès enregistré à la mairie de Salles-la-Source, signé du maire Elie Benoit et de (Georges) Pierre Guibert, grand-père de l’actuel gérant :

acte-deces-pierre-bruyas-20-juillet-1932

Biographie de Pierre Bruyas publiée sur la revue des anciens élèves de septembre 1932 :

biographie-pierre-bruyas

Autre éléments de biographie sur « Patrons de France »

4 Responses to Décès accidentel de l’ingénieur Pierre Bruyas, le jour de la mise en service de la microcentrale hydroélectrique de Salles-la-Source

  1. cave dit :

    « Un récent article publié par « Ranimons la cascade ! » sur ce site racontant la bénédiction de la microcentrale par l’évêque, en présences des toutes les autorités politiques et administratives, a suscité un contact avec les descendants de cette personne chez qui cet événement est loin d’être oublié. »

    Etant l’un des petits-fils de Pierre BRUYAS, je me permets de préciser que c’est parce que nous ignorions la tenue de cette fête de bénédiction 3 mois à peine après l’électrocution de notre grand-père que je vous ai manifesté notre étonnement.

  2. Ergé dit :

    Sauf objection de la part de quelqu’un qui connaîtrait incontestablement toute la vérité des faits qui se sont produits le 20 juillet 1932, tout porte à croire que ce que l’on sait actuellement montre à l’évidence que tous les gens qui ne sont pas de la famille de la victime et qui se sont exprimés sur le sujet, ont caché le fait que l’ingénieur Pierre Bruyas, installateur de la conduite forcée, a succombé ce jour-là à une électrocution sur le site même de l’usine de la SHVSS construite illégalement sous la direction de l’ingénieur électricien Etienne Bastide

  3. CAVE dit :

    Il semble tout de même que la mémoire de la disparition de notre grand père dans des circonstances aussi brutales qu’inexpliquées pour ses descendants ainsi que pour tous les protagonistes de la centrale de Salles-la Source demeure plus que secondaire aussi bien pour les défenseurs de la cascade que pour ceux qu’ils pourfendent.

    • Ce reproche paraît excessif. A notre mesure, nous avons fait connaître localement le récit accidentel de Pierre Bruyas et le refus d’assumer ses responsabilités de la SHVSS en 1932. Il n’y a pas eu de plaintes et les témoins sont morts depuis longtemps aussi, à part honorer sa mémoire, nous ne savons pas que faire de plus . Il est vrai aussi que nous menons un combat titanesque depuis près de 8 ans pour tenter de mettre fin à une entreprise qui durant 85 ans a été, avec l’aval de l’Administration, en dehors et au dessus des lois.
      Si vous avez l’occasion de passer à Salles-la-Source, ne manquez pas d’entrer en contact avec nous et si vous avez une idée pour garder vivante la mémoire de votre grand-père, localement ou sur internet ,nous sommes preneurs.

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