Huitième anniversaire : le 8 décembre 2010, le CODERST donnait un avis favorable à ce qui allait devenir un gigantesque fiasco

Le 8 décembre 2010 restera comme un jour noir dans la mémoire de tous les défenseurs de la cascade. Ce jour là, le CODERST (Conseil de l’Environnement et des Risques sanitaires et technologiques), réuni en la préfecture de Rodez, votait un avis favorable à la demande d’autorisation déposée par la Société Hydroélectrique de la Vallée de Valles-la-Source (voir : « un CODERST bien aux ordres »), en dépit d’une opposition massive exprimée lors de l’enquête publique, dénonçant l’opacité de ce dossier.

Ce passage en force entraînait l’Administration dans un jeu dangereux dont nous payons encore aujourd’hui les conséquences. En cause la volonté manipulatoire des représentants de l’administration décidée à faire passer coûte que coûte le projet, l’absence de tout débat contradictoire, le manque d’information sur un sujet complexe et enfin ce qu’on doit bien appeler la naïveté et le manque de curiosité de la plupart de ses membres.

Le CODERST est une commission consultative, réunie sous convocation du préfet, qui en nomme  les membres. Il est censé l’éclairer dans toutes les décisions concernant notamment l’environnement ou la santé publique. C’est en principe la dernière étape après l’enquête publique et avant la décision préfectorale.

Alerté par de fuites du contenu (très confidentiel) du document envoyé aux participants, « Ranimons la cascade ! » avait alerté l’opinion publique via la presse et chaque participant avait reçu un document complet d’information : « Salles-la-Source ou le feuilleton d’une cascade qu’on… assaseche ! » ainsi que le « petit catalogue de la désinformation -en paroles ou par omission- de l’Administration ».

Le compte-rendu « officiel » qui sera fait de cette réunion en relate les grandes étapes. Il montre bien comment l’Administration peut très bien faire voter un avis favorable sur un dossier  truffé de fraudes en éliminant tout avis contradictoire et en « enfumant » son public. Dans ce domaine il reste un modèle du genre tant il peut donner au lecteur non averti une apparence de sérieux. Huit ans de mobilisation associative plus tard et après une enquête ministérielle dénonçant un « FIASCO ADMINISTRATIF », le problème n’est toujours pas définitivement réglé tandis que l’Administration (représentée notamment en Aveyron par Danièle Polvé-Montmasson, préfète, Jean-François Moniotte, secrétaire général et Renaud Rech, chef de  la Police de l’eau) y ont perdu beaucoup en crédibilité.

La réunion de ce 8 décembre 2010, menée par le secrétaire général de la  Préfecture de triste mémoire, Jean-François Moniotte, va commencer par l’expulsion du président de « Ranimons la cascade ! », pourtant invité par le Maire de Salles-la-Source à l’accompagner : « Vous n’êtes pas invité, on vous entend assez dans la presse ». (Rappelons qu’il est courant que soit invité au CODERST un ou des représentants associatifs connaissant bien le dossier…). L’absence de tout contradicteur facilitera ainsi grandement la tâche au secrétaire général de la préfecture…

En revanche, le gérant de la microcentrale dont on sait aujourd’hui que son exploitation est totalement illicite depuis 1932, pourra lui, inviter son ouvrier et surtout un parent éloigné, le fameux Geniès Imbert, ancien chef d’entreprise en import-export située au Luxembourg dont il est aujourd’hui clair qu’il a tiré les ficelles de cette affaire en s’aidant d’un puissant et plus ou moins occulte réseau de connaissances bien placées.

Au cours d’un long exposé truffé d’erreurs, les représentants de l’Administration vont alors endormir l’assistance en les abreuvant de données techniques invérifiables et en ne présentant que certains aspects du dossier, non sans avoir dénigré l’association « Ranimons la cascade ! » et distribué des fleurs à la DDT en soulignant son « travail remarquable ».

Il serait long et fastidieux de reprendre toutes les erreurs énoncées (il y en a, à la lumière de ce que nous savons aujourd’hui, près d’une par paragraphe…). Les plus spectaculaires mensonges prononcés ce jour là concernent la levée des 2 réserves à l’avis favorable prononcé par le commissaire enquêteur : Jean-François Moniotte « invente » une table ronde qui n’a jamais eu lieu pour débattre du débit de la cascade et des conséquences de l’exploitation sur l’assèchement de celle-ci ! Quand à la DDFIP (service fiscaux de l’Etat en Aveyron), elle reconnaît une capacité financière à une entreprise qui sort de redressement judiciaire au vu de comptes totalement faux (qui entraîneront par la suite la condamnation du gérant en mars 2018 pour « abus de biens sociaux »).

Peu importe que la Commission des Sites (CDNPS) n’ait pas statué ni voté, on va donc faire voter le CODERST « sous réserve d’avis favorable de la commission » (on sait ce qu’il en sera, le vote ultérieur de celle-ci n’étant pas obtenu, Jean-François Moniotte demandera le report de celui-ci pour bidouiller le projet afin de l’obtenir. Aura lieu alors un deuxième CODERST en 2012, modifiant la décision précédente, puis un troisième en 2016, annulant enfin la décision  : la précipitation n’aura pas été bonne conseillère…)

Un long débat suivra ou les capacité d’enfumage de l’Administration vont se révéler redoutables :

  • Qu’en est-il de la sécurité du barrage le plus haut (on ne dira pas aux participants qu’il n’a jamais été autorisé…) : un examen sera fait ultérieurement.
  • Le maire exprime les plus grand doutes sur la capacité financière de la société qui ne paye pas sa redevance depuis 2006 (et donc indirectement la sécurité de l’installation) : ceci ne regarde pas le CODERST.
  • L’exploitant ne disposerait pas des servitudes de passage ? Pas de soucis, ce ne serait qu’un « litige privé » (alors même que la maîtrise foncière est un préalable à tout dépôt d’une demande d’autorisation). On sait aujourd’hui que cette maîtrise n’est en rien acquise puisque l’installation et ses « terrains d’emprise » reviennent de droit à l’Etat en fin de concession…
  • Concernant l’état de la conduite forcée, on est prié de croire le gérant, jean-Gérard Guibert : « la conduite est en parfait état ». Peu importe que d’importantes fuites aient eu lieu au cours de l’automne 2010. D’autres qui se produiront de nouveau au cours de l’été 2017 confirmeront le bienfondé des inquiétudes exprimées ce jour-là par les participants.
  • Quid de l’intérêt touristique de la cascade. Pas d’inquiétudes ! Le minimum légal sera maintenu (100l/s en été et 40 l/s le reste du temps). Des chiffre qui ne voudront rien dire pour les participants ne sachant pas que ces chiffres ne représentent qu’un « pipi de chat », comparés au potentiel naturel de la célèbre chute qui a fait depuis des siècles la célébrité de Salles-la-Source.
  • Concernant les délais légaux non respectés, on annonce que la demande préalable a bien été déposée en temps et en heure le 31 décembre 1998; « On vient de la retrouver au ministère ! » malheureusement, lorsque à l’issue d’un procès perdu par le Ministère de l’Environnement, celui-ci sera contraint d’en apporter la preuve, il sera contraint d’avouer qu’il ne dispose plus de l’original qui a été égaré…
  • Qu’en est-il du statut actuel de l’exploitation depuis la fin de la concession le 31 décembre 2005 ? Renaud Rech a la réponse : l’exploitation peut continuer à turbiner aux conditions de la concession sous le régime des « délais glissants ». Cette doctrine, mise à mal par « Ranimons la cascade ! » sera abandonnée en décembre 2012  par l’Administration qui retrouve alors « miraculeusement » dans le dossier une convention signée avec l’exploitant en 2006 qui réduite le débit de 1150 kW à 530 kW. Dès lors la doctrine officielle de l’administration sera de dire que la SHVSS turbine à 530 kW maximum depuis 2006 (ce qui est totalement démenti par ses résultats économiques de l’exploitation). On comprend le refus obstiné de l’Etat et d’EDF de nous communiquer le chiffres exacts de la production durant toute cette période…

C’est ainsi que sera voté un « avis favorable » au projet de la SHVSS par 15 voix « pour » (dont la moitié font partie de l’Administration…), 5 voix « contre » (Honneur à eux !) et 1 abstention.

Post scriptum : que sont devenus les responsables de ce fiasco ?

Les 3 responsables en Aveyron dont le nom est indissolublement lié à « l’affaire de la microcentrale électrique de Salles-la-Source » 

Danièle Polvé-Montmasson, qui a mené d’une poigne de fer ce passage en force du dossier en tant que préfète, a poursuivi sans être inquiétée sa carrière de préfète en Charente, puis dans la Manche puis dans le  Puy-de-Dôme. Elle a été nommée en 2018 présidente du conseil d’administration de l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS) et de l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI).

Jean-François Moniotte, qui a mené avec zèle au service de la précédente le combat contre « Ranimons la cascade ! », n’hésitant pas à dénigrer un de ses responsable dans la presse, fut nommé, à la suite de son passage en Aveyron,  chef du bureau des personnels administratifs au ministère de l’intérieur avant d’être nommé sous-préfet de Carpentras. Il est désormais, depuis 2017, chef du groupement des moyens aériens de la base aérienne de Nîmes…

Renaud Rech, qui a tenu toutes sortes de propos mensongers et invraisemblables sur cette affaire, en tant que chef de la Police de l’eau à la DDT de l’Aveyron, coule des jours paisibles à la retraite depuis l’été 2017 !

5 Responses to Huitième anniversaire : le 8 décembre 2010, le CODERST donnait un avis favorable à ce qui allait devenir un gigantesque fiasco

  1. Berger dit :

    Danièle Polvé-Montmasson à l’ANTAI ? Lorsque l’on sait qu’Anticor a porté plainte contre X pour délit de favoritisme et prise illégale d’intérêts dans le cadre de l’attribution des marchés publics du contrôle automatisé des infractions routières (radars automatiques), on peut se demander si elle va gérer ce « fiasco » comme elle géré l’affaire de la cascade de Salles-la-Source…

    http://www.anticor.org/2015/12/23/anticor-porte-plainte-dans-le-dossier-des-radars-automatiques/

  2. ERGE dit :

    Le 13 janvier 2011, la préfète Polvé-Montmasson affirmait avec force aux journaux, « pour leur complète information », une existence de droits fondés en titre que le préfet Laugier ne reconnaissait pas le 25 octobre 2017.

    • La question se pose désormais : un préfet (ou une préfète…) doit-il ou non répondre de ses actes comme le citoyens ordinaires ? Peut-il ou peut-elle affirmer tout et n’importe quoi, drapé-e dans l’autorité de l’Etat, sans être sanctionné-e ?

  3. Jupitérou dit :

    Mme Polvé-Montmasson et son acolyte Jean-François Moniotte ont été , dans la période récente, parmi les acteurs principaux du fiasco administratif dénoncé par la mission interministérielle. L’inénarrable Moniotte a même été jusqu’à carrément falsifier la procédure en inventant une fausse table ronde pour être en conformité avec les préconisatios du commissaire enquêteur. De quelles sanctions administratives et/ou pénales ont fait l’objet Mme Polvé-Montmasson et M. Jean-François Moniotte ?

  4. ERGE dit :

    Un préfet, ou une préfète, confiant en ses services,signe ce que ceux-ci lui proposent; ce peut être n’importe quoi, vrai ou faux, suivant le service ou l’époque.
    Une certaine déontologie voudrait que les services s’abstiennent de raconter n’importe quoi au préfet, ou à la préfète, ce qui n’est pas le cas, comme on peut le constater par des recoupements.
    Ces constats traduiraient-ils une certaine incompétence des services, ou bien toute autre raison mystérieuse ?

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